Conférence le mercredi 1er avril 2015, à 19 h au CRFJ, animée par Marie-Claire Lavabre. Titulaire d’un doctorat d’Etat. « Le devoir de mémoire » comme syntagme ou comme injonction pratique est attribué à Primo Lévi et de ce fait fortement associé à la commémoration du génocide des juifs d’Europe. Il apparaît cependant que la notion n’est que pour partie attachée à cette référence et que son explosion quantitative – dans les années quatre-vingt-dix – est allée de pair avec la multiplication des réalités auxquelles elle s’est attachée – de la conservation du patrimoine aux usages diversifiés de la commémoration, politique et culturelle –. Cette inflation n’est évidemment pas sans rapport avec le fait les acteurs politiques et sociaux, à tous les niveaux – du plus local au national – et partant les médias, se sont appropriés la thématique plus générale de la mémoire. Sans nul doute usé par de multiples usages, le « devoir de mémoire » suscite polémiques et controverses. Pour autant, les débats dans l’espace public, souvent accompagnés par des historiens qui plaident pour un « devoir d’histoire », tout comme les réflexions politico-normatives qui s’appuient sur la notion « d’abus de la mémoire », renvoient à une mise en question des revendications sociales et politiques qui, à travers la question de la « mémoire », posent le problème du récit national, d’une part, de la montée en puissance de la figure de la victime, d’autre part.
Marie-Claire Lavabre est directrice de recherche au CNRS. Depuis « Le fil rouge, sociologie de la mémoire communiste », paru en 1994 aux Presses de Sciences Po, ses recherches portent conjointement ou séparément sur la sociologie ou l’histoire du communisme d’une part, et sur le phénomène mémoriel et les approches de la mémoire en sciences sociales, d’autre part. Elle s’intéresse notamment au rôle social des historiens et aux usages publics de l’histoire, aux rapports ordinaires au passé et à la transmission intergénérationnelle dans les familles.Elle a enseigné la sociologie de la mémoire, l’histoire politique de la France ou l’histoire des sciences sociales à l’IEP de Paris, à l’EHESS, à l’Université de Paris Ouest Nanterre et à l’étranger, notamment à la F-U de Berlin (en collaboration avec Pr. Gesine Schwan), à Oxford (en collaboration avec Pr. Robert Gildea), en Argentine, en Pologne, et en Finlande. Elle a contribué aux écoles doctorales des universités de Varsovie, Sofia, Bucarest, Budapest, Québec, Cosenza (Calabre), Padoue, Belgrade et Sarajevo. Elle anime depuis plusieurs années, dans le cadre de la direction des thèses, un groupe de travail sur la sociologie de la mémoire et a la responsabilité d’un séminaire d’enseignement et de recherche « Mémoires et usages publics de l’histoire », commun à Sciences Po Paris et à l’EHESS, associé au CIERA et au Labex « Les Passés dans le Présent ». Depuis 2010, elle est directrice de l’Institut des sciences sociales du politique. En 2014, elle devient responsable scientifique du Labex « Les passés dans le présent », structure qui associe des laboratoires de recherche de l’université Paris Ouest Nanterre et de grandes institutions patrimoniales nationales.