Du 29 au 31 mai 2017, le CRFJ a organisé le workshop international “Normes et territorialité entre Orient et Occident : invention, partage et mémoire des espaces sacrés (ixe-xixe siècles)”, premier temps du programme de recherche Normes et pratiques du religieux entre Orient et Occident dirigé par Camille Rouxpetel (École Française de Rome) et Laurent Tatarenko (CERCEC), associant l’École Française de Rome, l’École Française d’Athènes, le CRFJ, le CéSOR, le CERCEC et l’Université catholique de Louvain. Les trois journées ont été accueillies successivement par le CRFJ, le Swedish Christian Study Center et l’École biblique et archéologique française.
La géographie du « fait religieux » renvoie à une définition plurielle du territoire entendu comme un espace rattaché à une communauté de croyants. L’évolution de l’Église latine et l’institutionnalisation progressive de ses pratiques ont mis en avant les cadres spatiaux de l’administration cultuelle, perçus à travers les frontières entre les juridictions. Pourtant, si ces principes se référaient en apparence aux règles déjà énoncées dans les premiers conciles chrétiens, la tradition issue des christianismes orientaux a continué bien plus longtemps à concevoir les territoires de l’Église comme le produit de phénomènes éminemment sociaux. Dans cette perspective, les espaces sacrés prenaient la forme d’empreintes façonnées par les divers liens entre les lieux de culte ou sièges de l’autorité cléricale et les rassemblements locaux de fidèles. Ce contraste s’observe notamment dans la nature des structures paroissiales, présentées précodement, dans l’usage latin, comme des unités territoriales et, dans les communautés orientales, confondues avec les implantations de l’administration princière puis désignées comme des « lieux d’affluence » des croyants — ainsi le приход dans les communautés slaves. Enfin, la topographie sacrée emprunte autant au réel qu’au symbolique, dans un échange constant entre les écrits du religieux — Écritures saintes, hagiographie, récits de pèlerinage —, les pratiques liturgiques, les usages sociaux et les itinéraires arpentés par les fidèles et les religieux qui participent à la définition d’un « territoire sacré » à partir de lieux sanctifiés. Cette géographie se complique encore par les concurrences entre les Églises et les communautés autour de lieux communs d’une part, et par les cadres normatifs, relevant des espaces chrétiens et islamiques, qui définissent l’usage des lieux cultuels d’autre part.
Le workshop a abordé chacun de ces trois domaines sur le temps long (entre IXe et XIXe siècles) à travers l’étude de cas concrets choisis dans les zones de contact entre les christianismes d’Occident et d’Orient, depuis le sud de la péninsule Italienne jusqu’aux régions de la Méditerranée orientale, en passant par les régions de l’Europe orientale et balkanique.